Intervention de Aïcha Sif, EELV, sur le rapport République, Laïcité et Citoyenneté « un devoir d’avenir » ...
Assemblée Plénière de la Région PACA
Rapport n°1
Monsieur le Président, chers collègues,
Nous vivons dans un monde où les crises, économiques, écologiques exacerbent fortement les tensions. Un contexte où il est plus aisé de dénoncer des boucs–émissaires que de rechercher des solutions non palliatives. Ainsi accuser de tous les maux l’autre, l’étranger, le non croyant ou le croyant, est devenu, au sein d’une société duale et cloisonnée, simplement et toxiquement banal.
En Provence-Alpes-Côte d’Azur 45% des jeunes des zones urbaines sensibles sont au chômage. Les plus jeunes habitants de ces territoires sont près de trois fois plus pauvres qu’ailleurs. Quelles sont leurs chances de s’émanciper ? Quelles perspectives d’avenir leur offrons-nous ? Inégalités de revenus, de patrimoine, d’éducation, de conditions de santé. Ghettos, Apartheid territoriale : ces mots tres forts expriment l’ampleur de la ségrégation et de la violence sociale qui s’exerce sur les plus pauvres.
Il faut faciliter l’accès à un emploi ouvrant sur un revenu décent. L’accompagnement vers un vrai metier, la desserte en transports publics sont des enjeux-clé pour permettre aux jeunes des quartiers de relégation d’avoir un parcours professionnel conduisant à la reconnaissance individuelle et à la construction d’une autonomie sociale. Tout particulièrement dans l’approche de l’économie sociale et solidaire, qui place l’humain au cœur de l’activité professionnelle et offre les conditions d’une émancipation à travers un emploi de qualité. La capacité à vivre de son travail et à en être fier est un indispensable levier d’action contre l’économie illégale, au côté de la répression des trafics en tous genres qui donnent l’illusion de l’argent facile.
Et nous devons faire vite, dans ces quartiers en direction de cette jeunesse, il y a urgence.
En France, comme l’a récemment souligné un rapport européen, l’antisémitisme, l’islamophobie, l’homophobie et les autres formes d’exclusion gagnent du terrain. Les discours haineux des démagogues, des prédicateurs et autres extrémistes nous renvoient aux pires heures d’une histoire qui a enfanté la barbarie fasciste et l’abomination nazie. Face à cela le besoin de sécurité, le renforcement de la vigilance policière ne peuvent s’imposer comme l’unique réponse. C’est au peuple, aux citoyens, pleinement conscients des enjeux, qu’il appartient de réagir. Seule une réponse collective et réfléchie garantira durablement la paix sociale et le vivre ensemble.
Si la démocratie et la République, dont les lois rappellent que le racisme n’est pas une idée mais un délit, constituent notre cadre de référence nous devons aussi inscrire notre action au plus près du terrain régional et rappeler, à ce niveau, l’importance de la tolérance, les enjeux de la laïcité.
Le défi majeur, ici peut être plus qu’ailleurs, c’est ce fameux vivre ensemble, vivre tous ensemble et non pas les uns à côté des autres, les uns séparés des autres. Avec ces différences qui parfois nous opposent mais qui sont en fait une richesse, la base même du partage.
Hérités des grecs et des romains les places de nos villes et nos villages doivent redevenir des lieux de rencontre, d’échange, de convivialité. Menacés par la péri urbanité et la spéculation les structures urbaines se fragmentent, les noyaux villageois s’isolent.
Les écologistes ont obtenu que les politiques régionales dans les territoires « relégués » soient mieux financés : les dotations des lycées, notamment, seront augmentées dans certains quartiers.
La Région, architecte du territoire, doit rompre cette logique de séparation et promouvoir la mixité sociale comme générationnelle. Pour rentrer dans l’opérationnel et anticiper quelque peu le déroulé de notre plénière c’est cet équilibre que vise nos futurs contrats territoriaux.
Sur cette terre méditerranéenne immigration et intégration, et je suis pétrie de cette argile, ont été les lots communs d’une histoire multi séculaire et toujours actuelle.
Les influences hellénistiques et latines ont posé les fondements de notre première démocratie. L’islam d’Al andalous, l’apport de juifs du pape, l’arrivée des alpins, premiers immigrés de l’intérieur, des italiens, de ceux de la péninsule ibérique, des arabes, des berbères et tant d’autres tous par leur travail, leur culture, leurs connaissances ont enrichi cette région.
Elles lui ont donné sa langue et forgé une culture trait d’union entre la Méditerranée, l’Arc latin et l’Europe du Nord
Nos anciens ont bâti la république et lui ont légué la Marseillaise. Ils l’ont défendu en 1851, dans les communes ou les maquis. Ils ont tissé ce lien social qui nous unit encore aujourd’hui. Leur histoire, leurs combats, leurs expressions culturelles doivent nous rassembler. Valoriser cette mémoire, ré inventer une identité ouverte, à partir de nos réalités locales, régionales, méditerranéenne voilà la voie !
Si nous ne le faisons pas, si nous démissionnons alors c’est une autre identité, anti sociale et anti démocratique qui triomphera. Celle-là même qui a nourri les assassins de Charlie.
A leur obscurantisme aveugle nous devons leur opposer les lumières de notre philosophie et de notre histoire.
Aux formes d’exclusion, de terreur de haine qu’ils entendent imposer nous devons répondre par le vivre ensemble et par le plus beau mot que la langue d’Oc a transmis au français par l’amour, l’amour de la République
Voilà mes chers collègues notre traduction régionale du combat pour une république de liberté, d’égalité, de fraternité, mais aussi d’humanité, de solidarité et de diversité.
Je vous remercie.